Livre de bord

Entre le sud de l’île de Palawan aux Philippines et le nord de Bornéo, l’expédition a traversé - finalement sans encombres - l’une des régions les plus mal famées du globe. Non sans avoir pris des dispositions exceptionnelles pour y éviter les mauvaises rencontres. Carnet de bord

Nous quittons Pirates Hold au nord-ouest de Palawan dans la nuit du 14 février 2018. La tempête tropicale annoncée s’est finalement désintégrée dans la mer de Sulu et nous profitons alors du vent pour continuer notre route en direction de Sabang, à une journée de navigation. C’est assez piquant d’avoir trouvé refuge dans cet « abri à pirates », une petite baie parfaitement abritée des vents, alors même qu’on s’apprête à aborder plus au sud l’une des régions les plus mal famées du globe…

Durant notre descente sud-ouest, nous nous arrêtons dans une baie sans nom où nos cartes marines indiquent « fresh water ». Une petite maison sur la plage, une rizière et finalement une rivière nous permet de remplir quelques bidons d’eau douce. Nous quittons malheureusement assez rapidement cet endroit paisible pour continuer notre navigation et arriver de jour à destination, Sabang. Aux premiers abords, nous aurons du mal à discerner le village mais les nombreux bankas (embarcations traditionnelles à double balancier) au mouillage nous indiquent clairement que nous sommes au bon endroit.

Pietro et Candy partent en minibus pour la petite ville de Puerto Princessa, située sur la côte est de Palawan pour y faire les formalités de sortie de Fleur de Passion des Philippines pendant que Aurore, Pierrick, Ugo et les passagers visitent le village, les alentours et s’occupent de l’avitaillement. En arrivant à Puerto Princessa, ô surprise! Ce vendredi 16 février 2018, c’est le nouvel an chinois et l’immigration ainsi que les douanes sont fermées… « Come back Monday », nous dit-on. Ce qui est rigoureusement impossible, nous devons partir dès le lendemain samedi pour respecter notre planning. Le bateau est en effet attendu le 22 février à Brunei en prévision d’un événement à bord le 26. Qu’à cela ne tienne! Nous ferons finalement les papiers d’immigration à l’aéroport. Le tout ne prendra que quatre heures et demie (sans les trajets Sabang – Puerto Princessa), ce qui n’est pas si mal comparé à d’autres procédures de sortie lors de précédentes escales.

Le samedi matin 17 février, Stephen l’instructeur de plongée nous quitte après trois mois de bons et très appréciés services à bord depuis Manado, en Indonésie. Nous préparons le bateau pour le départ dans l’après-midi. Sans être lourd ni pesant, le climat qui entoure le départ des Philippines est alors très particulier. Depuis Sabang jusqu’à Brunei, sur l’île de Bornéo, l’expédition s’apprête en effet à traverser l’une régions du globe réputée parmi les plus dangereuses en raison de la piraterie endémique qui y sévit. Des dispositions très exceptionnelles ont donc été prises pour minimiser les risques de mauvaises rencontres pendant les quatre jours de mer qui suivent. C’est ainsi pratiquement toutes voiles dehors mais surtout tous feux éteints que Fleur de Passion met le cap au large, plein ouest en direction des îles Spratley, pour éviter au maximum le sud de Palawan.

Ce n’est pas non plus sans une profonde émotion que nous quittons les Philippines après y avoir séjourné deux mois depuis l’arrivée de l’expédition à Cebu, début décembre 2017, et y avoir multiplié de si belles rencontres. Au revoir les Philippines et merci pour votre accueil, votre soutien et votre enthousiasme, cette escale - et non des moindre d’un point de vue symbolique - était magnifique !

Notre navigation furtive sera compliquée au début faute de vent (force 2-3) pour être très agréable sur la fin (bon force 4), cette fois-ci avec toutes les voiles dehors (grand-voile, artimon 2 ris, trinquette, yankee, clin foc). A plusieurs dizaines de miles au large de Palawan, suffisamment loin des côtes pour ne plus y risquer de mauvaises rencontres, nous virons plein sud en direction de Brunei.

Dès le mercredi 21 février, au large du riche sultanat, nous apercevons les premières plateformes pétrolières qui font sa fortune, et quelques cargos. Le lendemain comme prévu, nous arrivons dans la baie de Bandar Seri Begawan et y trouvons une ambiance industrielle et pétrolière - eau verdâtre et brunâtre - qui tranche avec les splendeurs naturelles rencontrées pendant trois semaines depuis Puerto Galera. C’est là que nous faisons escale pendant quatre jours, le temps notamment d’accueillir à bord des écoliers pour une courte sortie en mer.